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Afrique 50
Vidéo numérique
Souvent présenté comme le premier film anticolonialiste de l’histoire du cinéma, "Afrique 50" déconstruit catégoriquement le mythe de l'œuvre civilisatrice de la France coloniale. "Afrique 50" est également un acte de résistance flamboyant à l'oppression violente de l’Homme par l’Homme. René Vautier prend le maquis en 1943 à seulement 15 ans. Après la guerre, Vautier adhère au Parti communiste français et suit les cours de l’IDHEC (l’actuelle Fémis). En 1950, la Ligue de l’enseignement lui commande un film sur l’éducation française en Afrique. Mais René Vautier préfère montrer le travail forcé et les violences de l’administration coloniale contre les populations de l’Afrique occidentale française (AOF). Tourné pendant un an au Sénégal, au Soudan français (l’actuel Mali), en Haute-Volta (l’actuel Burkina Faso), et en Côte d’Ivoire, "AOF, Afrique 50" vaut à son réalisateur de seulement 21 ans, une condamnation à un an de prison. Longtemps resté invisible, "Afrique 50" rompt radicalement avec l'exotisme porté par un certain cinéma français, qui mêle ethnographie et propagande sur fond de lointaines colonies. Sur la musique entêtante du dramaturge et compositeur guinéen Keïta Fodeba, Afrique 50 déroule un commentaire enflammé, qui dialogue avec le montage nerveux et percutant, d’images néanmoins fragiles et vacillantes. La voix de Vautier martèle sa colère ravageuse sans que nul ne sache si les images tremblent ou si sa voix les fait trembler. “En fait, c’est nous qui tremblons quand René Vautier scande les noms des bourreaux et des compagnies coloniales, qui exploitent, maltraitent et assassinent.” écrit le cinéaste Christian Lebrat. René Vautier découvre lors de son voyage africain toute la violence de l'entreprise coloniale sur les hommes comme sur la terre. Sa formation communiste et son passé de résistant se conjuguent dans une analyse irrévocable de la situation. Vautier regarde en effet le fait colonial comme un système global d’oppression : “On ouvre une école quand les grandes compagnies coloniales ont besoin de comptables. On envoie un médecin quand les grosses compagnies risquent de manquer de main d'œuvre.” Vautier fustige la misère comme la conséquence d’un système prédateur, fondé sur l'exploitation systématique de toutes les ressources au moindre coût : “Ce n’est pas l’image officielle de la colonisation. Amis, la colonisation, ici comme partout, c’est le règne des vautours.” Mais Vautier va encore plus loin, anticipant les futures guerres sanglantes de décolonisation : ”Au nom de la France et de la civilisation, cette administration colonialiste répondra aux Africains comme elle a répondu aux Malgaches et aux Vietnamiens, par la force, la matraque, la prison, le fusil.” Son film-tract appelle sans plus tarder à la résistance et à la libération par la fraternité : “Le peuple de France et le peuple d’Afrique sont au coude à coude et cette place dans la lutte commune, le peuple africain la tiendra envers et contre tous jusqu’à ce que soit gagnée la bataille de la vie…”