Le livre relié est apparu au début de l’ère chrétienne. C’est seulement vers le VIe siècle que la reliure prend une grande importance. Jusqu’au XIIe siècle, elle est l’affaire exclusive des moines qui l’utilisent pour protéger leurs manuscrits. Ils cousent sur des nerfs de bœufs les feuillets de parchemin et des planchettes de bois forment les couvertures. Les orfèvres recouvrent alors l’ouvrage de riches étoffes avec des motifs d’or ou d’argent. De simple protection, la reliure devient donc vite un ornement prestigieux, et les artistes rivalisent de goût et d’ingéniosité pour décorer les livres qui leur sont confiés.
Au XIIIe siècle, le papier de chiffon est importé en Europe par les Arabes. Les manuscrits se multiplient et pour les recouvrir on emploie le parchemin, le vélin, la peau de truie, les palimpsestes. Les couvertures sont décorées et protégées par des coins de fer ou de cuivre ; chacune porte en outre cinq cabochons de métal et des fermoirs ciselés les maintenant serrées sur l’ouvrage. Ainsi bardé de fer et de cuivre, le livre du Moyen-Age ressemble à son contemporain, le seigneur féodal, dans son armure riche et lourde.
La dorure, qui apporte aux reliures leur finition et leur éclat, est apparue en Italie au XVe siècle. A cette époque, l’invention de l’imprimerie donne un nouvel essor à l’art de la reliure. Les ais de bois, qui servaient de couvertures, sont remplacés par des cartons formés de feuilles de papier collées ensemble. Les coins, cabochons et fermoirs de métal sont supprimés ; aux nerfs de bœufs, sur lesquels étaient jusqu’alors cousus les cahiers, on substitue des cordelettes de chanvre plus souples et aussi solides. Le veau prend la place du velours brodé pour la couvrure. Les plats de reliure sont gaufrés de fers ciselés et de filets « à froid ».
Au XVIe siècle, la décoration dorée des plats succède progressivement à cette technique, et la reliure décorée de filets, de roulettes, de fers répétés, parfois personnalisée de monogrammes et d’armoiries, connaît alors son apogée. Les « lieurs de livres » forment à cette époque une corporation puissante sous la tutelle de l’Université. Avec la production toujours croissante de livres aux XVIIe et XVIIIe siècles, en France et dans toute l’Europe occidentale, le nombre de collectionneurs augmente et, du même coup, le nombre d’ateliers de reliure. Ces derniers se livrent une concurrence effrénée et inventent toujours de nouvelles formes de décoration pour séduire leur clientèle.