Sommaire
Préface
« Quelles vibrations dans ce trait qui se risque parfois dans des taches, sous des rehauts d’un peu de couleur : le dessin ! ». Yves Bonnefoy, dans ses Remarques sur le dessin, laisse parler son émotion devant… « ce qui peut sembler moins […] mais qui parfois se révèle autant sinon presque plus ».
Cette fièvre née de la spontanéité, de la rapidité, quelquefois de la pulsion ou de la maturation reste une valeur que tous les artistes, à toutes les époques, ont tenté de nous faire partager. Le dessin est la manifestation du désir, de la volonté, parfois de la fureur. C’est souvent le premier geste de l’artiste, l’intermédiaire entre l’idée et la matière, entre l’envie et la générosité. Il dévoile une intimité profonde, une familiarité parfois troublante, sensible, sensuelle, ardente, charnelle. En admirant un dessin, c’est la main de l’artiste qui se sent, se devine et qui se suit dans le trait et le contour. Copies, études, projets, maquettes, ébauches, cartons, croquis, esquisses, pochades, le dessin, largement pratiqué depuis l’existence du papier, revêt des aspects bien différents jusqu’à devenir une œuvre majeure en soi.
Christophe Cousin, conservateur en chef du patrimoine, ancien directeur des Musées de Belfort.
Ernest PIGNON-ERNEST. Etude préparatoire pour le mur peint à Belfort : Ludwig van Beethoven, 1988. Lavis et gouache blanche sur papier canson - 39 x 28,5. Collection Musée de Belfort. Acquisition F.R.A.M., 1991. B 91.1.13
Ernest PIGNON-ERNEST. Etude préparatoire pour le mur peint à Belfort : Friedrich von Schiller, 1988. Lavis sur papier canson – 33,5 x 26. Collection Musée de Belfort. Acquisition F.R.A.M., 1991. B 91.1.32
Ernest PIGNON-ERNEST. Etude préparatoire pour le mur peint à Belfort : Ludwig van Beethoven, 1988. Lavis et gouache blanche sur papier canson - 39 x 28,5. Collection Musée de Belfort. Acquisition F.R.A.M., 1991. B 91.1.13
Ernest PIGNON-ERNEST. Etude préparatoire pour le mur peint à Belfort : Friedrich von Schiller, 1988. Lavis sur papier canson – 33,5 x 26. Collection Musée de Belfort. Acquisition F.R.A.M., 1991. B 91.1.32
Le mythe de l’invention du dessin
Kara, fille du potier Grec Dibutade, dit adieu à son amant. Avant qu'il ne parte pour un long voyage, elle dessine au charbon de bois son ombre sur le mur de l'atelier de son père, afin de pouvoir conserver son image à jamais.
Jean-Benoît SUVEE. Dibutades ou L’invention du dessin, 1791. Huile sur toile. - 267 x 131.5, Bruges, Groeningemuseum.
Jean-Benoît SUVEE. Dibutades ou L’invention du dessin, 1791. Huile sur toile. - 267 x 131.5, Bruges, Groeningemuseum.
Expositions consacrées au dessin
En France, la première exposition consacrée exclusivement à l’art du dessin eut lieu à l’école des Beaux-Arts de Paris en 1879. Ce genre de manifestation était déjà courant en Angleterre. Des précautions inhérentes à la fragilité des feuilles sont imposées, telles qu’une hygrométrie minimale et un éclairage de faible intensité. L’exposition ne doit pas excéder deux mois et les pièces montrées sont ensuite « mises en sommeil ». Certains dessins présentant de graves altérations ne sont plus exposés au public ; ils sont alors remplacés par des fac-similés. Ils restent cependant encore consultables pour de courts examens à la demande de spécialistes et d’historiens.
Denis BISSANTZ. La Lisaine. Pierre noire et sanguine. – 23,7 x 40,6. Collection particulière.
Introduction
De la Préhistoire à nos jours, les hommes ont toujours éprouvé le besoin de s’exprimer par le dessin. Ce besoin irrépressible a généré l’invention de toutes sortes d’outils grâce auxquels, au fil du temps, nous sont offertes les œuvres de génies du dessin d’art, de Dürer à Ernest Pignon-Ernest, artiste bien connu des Belfortains, pour ne citer que les deux extrêmes d’une très longue liste. Dessin d’art certes, mais également dessin de presse, caricature, bande dessinée ainsi qu’une foule d’autres représentations telles que le dessin d’architecture, le dessin technique, plus utilitaires mais néanmoins souvent tout aussi esthétiques.
Pour chaque dessin proposé, sont énoncés en détail l’origine de la matière utilisée, la manière d’en user, le support, ainsi que la période où on la rencontre le plus fréquemment. La diversité de ces matières induit la présence de dessins aussi bien très modernes que très anciens. Ces derniers, aimablement prêtés par des musées régionaux, nécessitent par leur fragilité, une pénombre qui peut surprendre les visiteurs.
Chaque médium est illustré par un ou plusieurs exemples, ancien ou contemporain, puisque nous commençons avec la pointe d’argent, instrument du XVIIe siècle, pour aller jusqu’à la pointe Bic, outil on ne peut plus moderne. Entre ces deux extrêmes existent d’autres techniques : le fusain, la pierre d’Italie, la sanguine, la mine de plomb, le crayon Conté, le pastel, le crayon de couleur et les encres.
L’art du dessin est intemporel et universel. Il continuera à enchanter bien des générations et évoluera sans doute avec de nouvelles matières ou d’autres techniques telles que le crayon digital et la tablette. Certes, cette dernière permet des corrections faciles, mais avec cette commodité, il est permis de se demander si l’on ne perd pas pas une grande partie de l’émotion créative engendrée par la trace définitive du crayon sur le papier.
Denis Bissantz
Denis BISSANTZ. Autoportrait (façon XVIIe siècle hollandais). Sanguine, pierre noire et craie – 17 x 19,5. Collection de l’artiste.
Denis Bissantz
Denis BISSANTZ. Autoportrait (façon XVIIe siècle hollandais). Sanguine, pierre noire et craie – 17 x 19,5. Collection de l’artiste.